Inde - 2001 à 2003 (Extraits)


Je ne fais que passer...


“Nous vivons dans la société du paraître, les indiens vivent dans la société de l’être. Ils sont ! La vie est là pleine d’énergie, la mort n’est jamais très loin.


Se rendre en Inde, c’est sans doute un peu avoir la sensation d’être, pouvoir affirmer... je suis ce que je suis, continuer à dire... je ne fais que passer...”


TC, mars 2002
















"Je ne fais que passer..." a été exposé au Festival des Chroniques Nomades en mai 2004 et au Photofestival d'Angkor (Cambodge), en novembre 2006.

Je ne fais que passer... - (Texte de Jean-Christian Fleury pour le Festival des Chroniques Nomades).


La difficulté majeure pour les photographes occidentaux en Inde est que tout y est incroyablement photogénique. Et pire encore s’ils travaillent en couleurs. C’est sans doute pourquoi, le plus souvent, les images qu’ils en rapportent se ressemblent tant. Face à ce décourageant feu d’artifice de couleurs chatoyantes, à ce foisonnement de scènes pittoresques et de personnages typiques, ne survivent que ceux qui, arc-boutés sur leur vision propre, transportent avec eux leur univers formel. Encore leur faut-il échapper à l’autre danger qui les guette : celui du formalisme, du placage d’une grille capable, bon gré mal gré, de s’imposer à la diversité du réel. Thierry Chantegret, qui est un habitué de l’Inde, esquive ce double écueil.

On reconnaît vite sa manière rigoureuse d’appréhender l’espace avec son Leica, cet ordonnancement idéal qui ignore la hiérarchie, où personnages et décors tendent à se fondre. Tout y est à la fois signe, porteur d’information, et élément graphique. Sa palette de couleurs aussi lui appartient.

A Buenos Aires, à Paris ou en Inde, les rouges francs tranchent sur les bleus délavés et les blancs incertains. Avec ici la concession des jaunes : les ocres, les safran. Pas de première personne. Nul protocole ne semble régir la relation entre les modèles et l’opérateur qui n’a d’autre ambition que l’absence, la transparence et sait se faire oublier à force de patience.

Pourtant, rien de glacé dans ses images. Si elle est distanciée, cette photographie ne verse jamais dans l’indifférence ou l’esthétisme. Car cette distance est d’abord celle de la

pudeur, la « distance respectueuse » qu’il s’est assignée. L’émotion n’est jamais bien loin derrière l’entrelacs des formes et le contraste des couleurs. La gravité non plus : l’Inde est le miroir qu’il interroge sur lui-même. Les images qu’il y capture sont les réponses qu’elle lui donne.

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